Peut-on traiter les élections sous l’angle constructif?

Jean Faniel, politologue et directeur du CRISP a accepté de partager ses réflexions autour de cette question. Actif au sein du CRISP depuis 12 ans, il pose un certain regard sur les médias et côtoie de nombreux journalistes. Synthèse de la rencontre.

Selon le politologue, le journalisme constructif peut être une piste pour «réenchanter le vote». Il s’interroge en effet sur la manière dont, en l’espace de 100 ans, la société est passée d’une situtation où certains étaient prêts à mourir pour acquérir le droit de vote au désenchante- ment actuel.

Les élections sont un moment important dans la démocratie car elles traduisent les rap- ports de force à un moment donné dans la société.

Néanmoins la démocratie ne se résume pas aux élections. D’autres modes d’expression existent pour peser sur la décision politique, même sans bulletin de vote.

Que peut faire le journaliste?

1. Revenir aux fondamentaux: qu’est-ce qu’une élection? A quoi sert-elle?

2. Mettre les choses à plat
3. Ne pas passer à côté de l’essentiel

1. Revenir aux fondamentaux

– Les élections ne sont pas qu’une histoire de conflit

Le journalisme doit revenir sur le sens même d’une élection. Le journaliste doit s’intéresser aux personnes certes, mais surtout aux projets eux-mêmes.

– Ne pas négliger la concurrence entre les projets politiques

C’est important si on veut faire du positif, du constructif : on ne doit pas nier le conflit. Il y a des divergences, certains programmes sont antagoniques, conflictuels… et il est important de le décrypter et d’en rendre compte.
Les élections sont souvent comparées à une lutte, à une compétition. Cela ne veut pas dire que ces conflits sont indépassables.

Traiter les élections de manière constructive, c’est aider les citoyens à prendre conscience qu’ils ont l’occasion de se prononcer sur leur destin, individuel et collectif

Ramener les électeurs à leur propre responsabilité
« Chaque voix compte ». Tant qu’il y a des élections, le journaliste peut rappeler que le citoyen a le pouvoir.

2. Mettre les choses à plat

Revenir sur le « pour qui on vote » : quel est le niveau de pouvoir concerné? Quelles sont les compétences dont dépend le niveau pour lequel je vote ? Quels sont les moyens octroyés à ces niveaux de pouvoir. Comment peuvent-ils agir?

Quels sont les partis en présence et que défendent-ils ? Une campagne électorale est aussi l’occasion de remettre tout ça à plat et de lutter contre les supposés connus.

3. Ne pas passer à côté de l’essentiel

Il ne faut pas se laisser piéger par le storytelling ou du moins ne pas s’y limiter.
Il est important de mettre en perspective les conséquences du choix électoral, les enjeux qui sont à l’œuvre et ne pas traiter la politique que comme un théâtre/spectacle.

La psychologisation de la politique contribue à la dépolitisation et au désintérêt de tous ceux qui ont arrêté de suivre la série « à la saison 5 alors qu’on en est à la saison 18 ».

Le secret, c’est la complémentarité. Il faut ajouter du contenu à la dimension théâtrale (qui attire tout de même un certain public).

Conclusion

Réenchanter la politique passe par une démarche d’éducation citoyenne, d’éducation permanente. Il ne s’agit pas d’enjoliver la réalité, mais de faire comprendre les enjeux du choix que les citoyens sont amenés à poser.

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